Le 3 novembre 1859, était déclaré, à Paris, le décès d’un éditeur et libraire français, Jean-Baptiste-Alexandre Paulin, âgé de 63 ans. Ce jour-là, les témoins qui se sont rendus en mairie du IIe arrondissement étaient bien incapables de préciser à l’officier d’état civil d’où était originaire cet homme de lettres, décédé la veille. De fait, très longtemps, le début de la vie de Jean-Baptiste Paulin resta obscur. Dans les années 1990, l’historien haut-marnais Jean-Marie Chirol, qui l’a mis en lumière dans sa “Lettre aux membres du club Mémoires 52” n°31, n’avait qu’une certitude : il avait vu le jour dans le canton de Doulevant-le-Château, sans plus de précision. On le sait depuis, grâce à un article paru en 1999 dans les Cahiers haut-marnais sous la plume de Pierre Lebeuf : c’était à Rizaucourt, le 18 juin 1796, et l’homme était en réalité prénommé Nicolas, Jean, Baptiste, fils de Jean Paulin, instituteur, et de Marie-Madeleine-Thérèse Deschamps, ultérieurement domiciliés à Baudrecourt.

Conspiration

Si Jean-Baptiste Paulin mérite ici ce coup de projecteur, c’est que cet autre célèbre éditeur haut-marnais (comme Flammarion, comme Albin Michel, comme Hatier) est le fondateur d’un des plus célèbres journaux français des XIXe et XXe siècles : l’hebdomadaire L’Illustration (1843-1944).

D’abord candidat à la prêtrise (c’est ainsi qu’il est qualifié lorsqu’il est tiré au sort en 1816 pour servir dans l’armée royale), Jean-Baptiste Paulin étudie le droit. Il sort de l’anonymat fin 1821 – début 1822 en participant à Belfort à une conspiration contre le roi réunissant militaires et «  jeunes gens déterminés  » parisiens. Mais l’entreprise tourne court. Alors maître d’études au collège Henri IV, le Haut-Marnais est arrêté, emprisonné à Colmar, jugé durant l’été 1822 mais finalement libéré.

Un siècle de parution

De retour à Paris, il participe notamment à la fondation d’un journal dont il sera le gérant jusqu’en 1834 : Le National. Les partenaires de cette entreprise : l’avocat et historien Adolphe Thiers, futur premier président de la IIIe République, Carrel et Mignet.

L’Illustration faisait la part belle aux dessins. (Collection Bibliothèque nationale de France).

Puis, en 1843, c’est l’aventure de L’Illustration, premier grand magazine illustré français. Cinq ans plus tard, la publication tire à 35 000 exemplaires ; en 1944, année de dernière parution, à 103 000.

« Dévouement »

Journaliste au Siècle, Edmond Texier rappellera que L’Illustration est « ce répertoire pittoresque de l’histoire universelle, qui reste encore aujourd’hui le premier de nos journaux illustrés ». Celui qui était également poète et romancier verra en Paulin « le plus modeste des hommes, (…) ce lettré qui se contenta de publier les livres qu’il aurait pu écrire. La vie de Paulin fut une vie toute de dévouement, de sacrifice et d’effacement ».

La foule de personnalités présentes aux obsèques de l’éditeur, emporté par la maladie à l’âge de 63 ans, et à qui le fils Victor succédera, témoigne de sa notoriété : outre son ami Adolphe Thiers, dont il publia la magistrale “Histoire du consulat et de l’Empire”, s’étaient réunis, en l’église des Petits-Frères, le célèbre lexicographe Emile Littré, le peintre Horace Vernet ou encore Ferdinand de Lesseps, le constructeur du canal de Suez.

Lionel Fontaine

Publié par Lionel Fontaine le lundi 16 janvier 2023 dans le JHM n° 10362 (Journal de la Haute-Marne) en page 4. http://www.jhm.fr

Publié par Lionel Fontaine le lundi 16 janvier 2023 dans le JHM n° 10362 (Journal de la Haute-Marne) en page 4. http://www.jhm.fr

Pour en savoir plus :

– Inès Jannot ouvre son nouveau chapitre le 2 mai 2019 à Langres
– Théo Caviezel et Johann Legrand : « Le Tour du monde de la Haute-Marne » le 21 mars 2022
– Nicolas Richard, des bureaux d’études au joug d’une saga fantasy le 09 janvier 2023
– Jean-Baptiste Paulin , le fondateur haut-marnais de L’Illustration le 16 janvier 2023