La marquise de Pompadour et l’Encyclopédie en 1754.

, par Christophe Juppin

Maurice Quentin Delatour est l’un des portraitistes les plus importants de la France du XVIIIe siècle. Il fallait de l’audace à Madame de Pompadour pour s’afficher protectrice d’auteurs récusant le principe de la monarchie absolue, alors incarnée par Louis XV dont elle était la favorite.

Voici la marquise de Pompadour, l’œuvre en pastel (beaucoup plus sensible à la lumière) par Maurice Quentin de la Tour entre 1748 et 1755.

Madame de Pompadour est née Jeanne-Antoinette Poisson le 29 Décembre 1721, décédée à Versailles à 42 ans de la tuberculose le 15 Avril 1764. Enfant de la bourgeoisie montante, elle est formée à la danse, la musique, le théâtre.

De 1745 à 1750, elle devient la favorite du roi Louis XV.

Me de Pompadour est une protectrice des arts et des lettres et soutient Diderot, Voltaire. C’est également une femme d’affaires qui permit le réaménagement de la manufacture de porcelaine de Sèvres avec les couleur jaune jonquille, le bleu de Sèvres ou le rose lilas appelé « rose Pompadour ».

A partir de 1750, elle devient la conseillère du roi, l’amie et sera la seule à être autorisée à mourir à Versailles, ultime privilège que lui accorde le roi. Il est donc possible d’affirmer que la marquise de Pompadour est une femme de pouvoir au XVIIIème siècle. En peinture, on ne représente pas de la même façon le portrait de l’homme de pouvoir et le portrait de la femme de pouvoir. La seule femme de pouvoir officiellement reconnue par la reine.

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La marquise de Pompadour, par Maurice Quentin de la Tour

Le tableau présente des dimensions considérables (175 par 128) qui correspondent au programme ambitieux de la marquise. Le favori du roi Louis XV avait commandé l’œuvre à Delatour en 1749, mais l’artiste ne l’a terminée qu’en 1754.

Un portrait politique audacieux : Placés sur la table où elle s’appuie, des ouvrages ont valeur de manifeste. Le premier d’entre eux, Pastor Fido, tragi-comédie de Guarini, renvoie au goût de la marquise pour le théâtre qu’elle aimait à jouer.

Les auteurs des livres suivants, philosophes parfois chassés de France, répondent au nom de Voltaire, auteur de La Henriade (1728), ou de Montesquieu, condamné pour son Esprit des lois (1749) mis à l’Index par l’Eglise en 1751.

A côté d’un ouvrage dont le titre est en partie effacé, apparaît le tome IV de l’Encyclopédie ou Dictionnaire raisonné des sciences, des arts et des métiers. C’est l’encyclopédie française, éditée de 1751 à 1772 sous la direction de Denis Diderot et, partiellement, de Jean Le Rond d’Alembert. La présence de l’Encyclopédie sur ce tableau marque la reprise de cette publication interdite en France depuis 1752.

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A côté d’un ouvrage dont le titre est en partie effacé, apparaît le tome IV de L’Encyclopédie qui marque la reprise de cette publication interdite en France depuis 1752.

La marquise est représentée dans son rôle de protectrice des arts : elle est entourée d’attributs qui symbolisent la littérature, la musique, l’astronomie et la gravure.

Ainsi, vous pouvez voir le tableau Le berger, de Fido de Guarini ; si nous regardons de plus près, nous trouverons aussi L’Encyclopédie, De l’esprit des lois, de Montesquieu, l’Henriade de Voltaire, une sphère, le Tractac des pierres gravées, de Pierre-Jean Mariette et une gravure du comte de Caylus.

Il fallait de l’audace à Madame de Pompadour pour s’afficher protectrice d’auteurs récusant le principe de la monarchie absolue, alors incarnée par Louis XV dont elle était la favorite. En avant des livres et du globe centré sur l’Europe et la France.

Autre évocation faite à la gravure et aux arts graphiques : les quelques feuilles qui s’échappent du carton à dessin placé aux pieds de la marquise et sur lequel se lisent les armoiries des Pompadour. La musique, quant à elle, est évoquée par des partitions ; l’une tenue entre ses mains de musicienne accomplie ; l’autre posée sur le fauteuil de l’arrière-plan, à côté d’une guitare baroque. Musique et arts, belles lettres et politique se trouvent ici réunis autour d’un portrait magistral. Le genre est en mutation au milieu du XVIIIe siècle et le portrait féminin se diversifie. Parmi les nouvelles formules, se développe l’image de la femme d’esprit. En voici un exemple dont la comparaison est flatteuse pour le portrait de la marquise de Pompadour. A la fois tableau d’histoire et portrait de l’intime, plaidoyer politique et incarnation d’une beauté, l’œuvre de Maurice Quentin de la Tour aura su jouer, au fil du pastel, sur l’oscillation des impressions.

Publié dans https://www.labellesa.cat

Publié par MLW le 01 août 2021 dans https://marie-wetzler.com


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SFEDS @SFEDS3 · 15 avr. 2013
Jeanne-Antoinette Poisson, marquise de #Pompadour, née le 29/12/1721, est morte le 15/4/1764. Pastel par #LaTour
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Frédéric Costes @FrdricCostes · 4 déc. 2022
Chef-d’œuvre de Jean-Baptiste Pigalle, "L’Amitié dévoilant son cœur" (et non son sein) est une statue allégorique-mais avec le visage de Mme de Pompadour- en marbre qui orna le bosquet de l’Amitié dans son château de Bellevue. Elle faisait face à une statue disparue de Louis XV.
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Benjamin Randow @benjaminrandow · 10 déc. 2022
Voyage dans le passé : la marquise de Pompadour reçoit Denis Diderot en compagnie de ses dames de compagnie.

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