Trois façons pour les déficients visuels de profiter des spectacles, musées et du cinéma à Orléans

, par Christophe Juppin

La fédération des aveugles et amblyopes Val de Loire s’investit pour que les déficients visuels puissent accéder à la culture. Plusieurs dispositifs techniques et de médiation existent et se développent dans les établissements orléanais.


Quand il s’agit d’accès à la culture des personnes déficientes visuelles, Bruno Gendron, président de la Fédération des aveugles et amblyopes de France Val de Loire, ne peut que déplorer : "il y avait un gros manque à Orléans".

"La déficience visuelle est mal connue, et parmi les stéréotypes, on trouve celui selon lequel les déficients visuels fréquentent peu les lieux culturels. Mais ils les fréquentent peu car ils ne sont pas adaptés. On travaille avec nos adhérents pour dire que la culture est accessible. C’est un handicap statistiquement minoritaire mais il y a un vrai besoin. Cela revient de plus en plus dans les discussions des adhérents, notamment pour les gens qui ont perdu la vue progressivement, et qui se retrouvent privés des loisirs qu’ils avaient avant. Cela rentre dans les missions d’intérêt général de la fédération, pas uniquement pour nos adhérents, mais pour l’ensemble des déficients visuels", affirme-t-il.

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Le cinéma des Carmes est équipé de dix récepteurs pour l’audiodescription. © Eric Malot

Avec les autres bénévoles, il s’investit beaucoup sur cette thématique. Leurs efforts commencent à payer : plusieurs établissements culturels orléanais pensent désormais davantage à ce public.

Du théâtre en audiodescription au centre dramatique national

Après une première expérimentation, sur une représentation de Festen, en mai dernier, qui a permis à une trentaine de personnes déficientes visuelles de profiter du spectacle, le centre dramatique national a décidé d’accentuer les propositions faites à ce public.

Face à constat, le CDN a décidé de s’équiper de casques et de récepteurs (une quarantaine et du matériel pour la régie, et une formation pour le personnel), et programme deux spectacles, cette saison, lors desquels ce dispositif sera proposé. Les déficients visuels pourront entendre Les bijoux de pacotille (sur la représentation du 25 janvier 2019, à 18 heures). Il ne s’agit pas à proprement parler d’une audiodescription mais d’une description détaillée puisque la comédienne est seule en scène dans un décor sobre.

Le deuxième rendez-vous donné sera Tarquin, du théâtre musical, sur la représentation du jeudi 13 février 2019 à 19 h 30. Une visite sensible du plateau scénique sera organisée avant la représentation. "Le décor est installé, et accompagnées d’un médiateur, les personnes déficientes visuelles s’y promènent, peuvent toucher les éléments du décor, appréhender la mise en scène. Cela leur permet ensuite de se faire une représentation mentale lorsque l’audiodescription leur donne des éléments de décor, et de mise en scène", décrit Nathalie Dumon. Avant les représentations en audiodescription, le CDN peut proposer des visites sensibles du décor.

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Avant les représentations en audiodescription, le CDN peut proposer des visites sensibles du décor.

Une visite guidée atypique au FRAC

Elles s’appellent les visites Entre-vues et ont été développées par le FRAC (fonds régional d’art contemporain) Centre-Val de Loire, en partenariat avec la fédération des aveugles Val de Loire. Le principe : "Démasquez les œuvres à l’aide d’un·e médiateur·rice. Ouverte à toutes et à tous, cette visite vous propose de changer de regard sur les œuvres. Paré.es de lunettes occultantes, les participant·es tentent d’imaginer l’œuvre qui leur est décrite... Sans utiliser les mots interdits !", est-il décrit sur le site du Frac.

La prochaine visite de ce type aura lieu le 2 janvier 2019, à 18h30. Tarif unique : 2€. Durée : 1h15. "Nous préférons les visites inclusives qui mêlent le public de voyants et de déficients visuels", souligne Bruno Gendron. Le musée des Beaux-Arts a déjà proposé des visites adaptées lors d’expositions temporaires, et engage un travail pour développer des propositions pour les déficients visuels sur ses collections permanentes et devrait former le personnel d’accueil à la prise en charge de ce public.

Un film au cinéma des Carmes

C’est le seul cinéma d’Orléans à le proposer. Depuis 5 ans, le cinéma des Carmes a acquis dix récepteurs et casques pour l’audiodescription. Ils sont mis à disposition gratuitement du public déficient visuel. "Il faut quelques minutes pour la mise en place, donc on conseille aux gens d’arriver un peu en avance. Nous avons aussi quelques habitués qui nous appellent avant de venir. On active le film sur le récepteur, et nous accompagnons la personne dans la salle pour voir si cela fonctionne", explique-t-on au cinéma. Il est soit possible de venir avec son casque, soit d’utiliser ceux fournis par l’établissement.

Dans le casque, la voix décrit ce qu’il se passe à l’écran, les éléments descriptifs ne se font pas pendant les dialogues. Pour eux, c’est leur mission : rendre le cinéma accessible à tous. "Normalement, tous les diffuseurs ont l’obligation de faire de l’audiodescription, malheureusement, ce n’est pas le cas. Et c’est encore plus rare sur les films étrangers", déplore Michel Ferry, responsable des Carmes. Cette semaine, du 20 au 28 novembre 2019, huit films étaient proposés en audiodescription.


Publié le 24 novembre 2019 dans le journal de la République du Centre


Pour en savoir plus :

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