« Quel gâchis !, tonne Pierre Soler-My. La France importe des lattes de parquet et du mobilier de jardin, sans parler du charbon de bois, provenant de pays à faible niveau de contraintes environnementales et à bas coûts de main d’oeuvre. Et dans le même temps, l’Hexagone perd ses emplois et son savoir-faire, et la déforestation se poursuit sur la planète ! », dit-il. Paroles de militant écolo ? Sans aucun doute ! Mais « Pierre Soler-My est avant tout un industriel, qui dirige Carbonex, » une société basée à Gyé-sur-Seine, dans l’Aube, fondée en 1993 avec ses frères. Leur père est déjà carbonisateur. Les méthodes, à l’époque, sont artisanales. La société fabrique, conditionne et distribue des briquettes et du charbon de bois à usage domestique.
La fin d’un système
« Nous nous sommes rendus compte que nous étions à la fin d’un système et nous avons réfléchi à d’autres options », se souvient-il. L’industriel part constater les méthodes de production locales, au Cameroun, au Nigéria, en Côte d’Ivoire, au Brésil... Le résultat de ses voyages d’étude en sans appel. « Le barbecue que nous faisons avec nos enfants le dimanche est peut être le fruit du travail d’autres enfants et d’une déforestation massive ! », s’indigne-t-il encore. Pas question d’accepter cette situation. « Grâce à l’innovation - et à un investissement de 25 millions d’euros - nous avons changé de paradigme, avec un procédé de fabrication exothermique, autrement dit, qui dégage plus d’énergie qu’il n’en consomme », explique-t-il.
Plus concrètement, la société, accompagnée par Bpifrance, qui l’a d’ailleurs intégrée dans son programme d’accélérateur PME pour la faire passer du statut de PME à celui d’ETI, a décidé de valoriser les fumées de carbonisation, qui peuvent générer de l’énergie. Un véritable virage éco-responsable, et un projet basé sur une innovation, qui non seulement sert à produire de l’électricité, revendue à EDF, puisque Carbonex a été lauréate de l’appel d’offres de la commission de régularisation d’énergie et a obtenu un contrat de 20 ans, mais qui alimente également ses propres fours, pour la fabrication du charbon du bois. « Avec une équipe d’ingénieurs nous avons développé nos outils, qui n’étaient pas disponibles sur le marché, et déposé des brevets », poursuit Pierre Soler-My.
Le premier prototype de ce four de co-génération a été testé en 2008. Il fonctionne depuis 2012. Et un nouveau sera pleinement opérationnel cette année. « C’est une Formule 1, qui intègre des technologies de pointe, dont l’intelligence artificielle », s’enthousiasme le PDG. D’autant que le but de Carbonex est aussi d’économiser la matière première, le bois. Une matière première - du bois d’éclaircie de chêne, de hêtre et de charme des régions Champagne-Ardennes et Bourgogne - sourcée localement, donc - et gérée de façon durable. « Grâce à nos innovations et à la réduction de nos besoins en bois, nous avons réussi à redevenir compétitifs, à créer des emplois et à rémunérer convenablement nos salariés », souligne l’industriel. Qui résume la performance, en particulier environnementale, avec une phrase choc : « Si l’on compare notre production de charbon de bois à celle qui est importée de zones géographiques controversées (autrement dit, soumises à la déforestation), la nôtre réduit les émissions de CO2 de 99 % ! ». En ce sens, Pierre Soler-My accueille avec satisfaction les contraintes supplémentaires dictées par la réglementation concernant les émissions. « Elles permettent de générer des innovations », assure-t-il.
Oser faire la preuve d’un nouveau concept
Son message pour la French Fab, dont il fait partie, est donc simple : « Industriels et consommateurs sont responsables. Tout le monde doit changer de vision et sortir de cette option pseudo libérale qui fait que l’on va toujours au moins cher. Notre mutation est la preuve qu’en osant, on peut y arriver », martèle-t-il.
Aujourd’hui, la société, qui enregistrait un chiffre d’affaires de près de 8 millions d’euros en 2010, en affichera un de 12 millions d’euros cette année. Avant, la société importait 5 à 6 millions d’euros de charbon de bois. Aujourd’hui, elle achète, localement, 5 à 6 millions d’euros de bois pour la production, irriguant ainsi l’économie locale. Son carnet de commandes est plein. L’effectif est passé d’une quinzaine de salariés en 2010 à 50 et devrait dépasser les 70 à la fin 2019, puis atteindre 120 collaborateurs en 2020.
Carbonex poursuit également son déploiement à l’international. La société exporte ses produits en Europe, et, accompagnée d’ONG spécialisées, étudie des implantations dans des pays forestiers, notamment en Afrique. « Mais notre volonté est de garder le savoir-faire français en France et d’être au plus proche des populations sur notre territoire, même si nous avons déjà des difficultés à recruter à la campagne », prévient-il d’emblée. S’il trouve des ingénieurs, il a plus de mal avec des profils intermédiaires , les uns étant sur-qualifiés tandis que d’autres ont une mauvaise image de l’industrie en général et rechignent donc à rejoindre ce secteur. « Au point que c’est un frein pour notre développement, sans oublier que cela induit une surcharge de travail pour nos salariés, regrette-t-il. D’où l’intérêt de la démarche de la French Fab, visant à faire découvrir les métiers actuels de l’industrie, faits d’innovation et riches de sens ».
Mais Pierre Soler-My veut rester optimiste. « Un nouveau modèle social et environnemental offre un potentiel d’activités énorme, en cohérence avec ce qu’il faut faire pour l’avenir de la planète et la cohésion de la société. Trop peu d’industriels en sont conscients », ajoute-t-il. Carbonex veut bien faire partie des pionniers, mais la société, et son PDG, ne seront satisfaits que lorsque d’autres industriels éco et socio-responsables auront rejoint le mouvement.
Publié par Elizabeth Baby le 20 aout 2019 dans https://www.latribune.fr
- Le board de la « Communauté French Tech Troyes ». De gauche à droite :
Marc THONON (Okenite), Francis BÉCARD (Technopole de l’Aube en Champagne), Pierre SOLER-My (carbonex), Mohamed ERRAFI (Gravybag), Jacques RIGAUX (Technopole de l’Aube en Champagne), Serge GRYGOROWICZ (RB3D), Catherine RABIET (Agri-echange), Lionel MUGNIER ( MIKROLAND), Germain CHITTARO (QareIT), Christophe JUPPIN (Nogentech), Pierre KACZMAR (Technopole de l’Aube en Champagne) Photo laurent Loccurcio à Troyes le 26 avril 2019.
- L’équipe de la communauté French Tech Troyes a constituée son équipe et a réunis son Board le 26 avril 2019
- 26/04/2019 @TechnopoleAube 1ère réunion du #Board #TroyesFrenchTech ! Les membres évoquent la synergie des territoires et les écosystèmes les plus favorables aux start’ups #réseaux #fertilisation croisée
- Le 25 juillet 2016 à Laval, le cluster Nogentech, et son département Prosthesis Valley, a intégré le "réseau thématique Healh Tech" pour les dispositifs médicaux . Nogentech a été distingué parmi les écosystèmes les plus favorables aux start’ups de la santé de la French Tech.
Pour en savoir plus :
– Comment le Technopole de l’Aube réussit à attirer des projets innovants
– Les nanotechnologies en toute simplicité.
– Annonce des labellisations Capitales & Communautés FrenchTech le 03 avril 2019 à @FrenchTechCtral Paris
– La « Communauté French Tech Troyes » voit le jour le 03 avril 2019
– La French Tech veut fédérer les acteurs de l’innovation le 03 avril 2019
– Un nouveau label French Tech pour le bassin de Chaumont-Nogent le 03 avril 2019
– Delphine Descorne-Jeanny : Une nouvelle présidente pour Nogentech le 25 avril 2019
– L’équipe de la communauté French Tech Troyes a constituée son équipe et a réunis son Board le 26 avril 2019
– Troyes intègre la « French Tech » et réunis son Board le 26 avril 2019
– Newsletter du cluster Nogentech n°04 du 15 juillet 2019
– Changer de business modèle… et changer le monde, c’est possible !