Jean-Claude Volot : un hussard haut-marnais chez Dedienne

, par Dominique PIOT

Désormais président du Conseil de surveillance de Dedienne Aérospace, Jean-Claude Volot négocie un nouveau virage – parfaitement maîtrisé – de son incroyable parcours d’industriel.


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Jean-Claude Volot : un hussard haut-marnais chez Dedienne

I. Jean-Claude Volot : un hussard haut-marnais chez Dedienne

Désormais président du Conseil de surveillance de Dedienne Aérospace, Jean-Claude Volot négocie un nouveau virage – parfaitement maîtrisé – de son incroyable parcours d’industriel. Rappel des faits.

Jean-Claude Volot a fêté ses 70 ans cet été 2019 ; son 15e été à l’Abbaye d’Auberive. Le 63e abbé du site a vécu ce “passage” avec bien plus de sagesse qu’on ne pourrait l’imaginer. Il a mis à profit les torpeurs estivales pour réorganiser sa bibliothèque d’art et son emploi du temps. Dans un cas comme dans l’autre, des bouleversements sont intervenus. L’occasion est belle pour revenir sur une incroyable carrière d’industriel, un trajet à nul autre pareil pour cet enfant de Haute-Marne.

Ses études d’ingénieur, à Metz puis à Paris, le destinaient à épouser une carrière d’enseignant : «  je voulais devenir professeur d’université en mécanique théorique ». Le hasard, la nécessité, le goût du défi en décidèrent autrement. Le premier virage intervient lorsqu’il croise Roland Dedienne en 1973. L’homme, « qui pouvait être mon grand-père » dirige à Paris une TPE de mécanique d’une dizaine de compagnons. Le jeune Jean-Claude Volot a déjà des idées ; il connaît aussi bien, très bien même, les polymères. Sous son impulsion, la petite entreprise devient Dedienne Polymères.

Et comme le garçon, rugbyman à Clamart (vous verrez, cela comptera beaucoup par la suite) n’est pas exactement un manchot, la petite entreprise connaît une croissance exponentielle. À 28 ans, il en devient le patron. Dedienne ne représente alors “QUE” quatre sites en France (Région parisienne et Normandie) et un site en Roumanie.

Création de Dedienne Santé à Montpellier

Jean-Claude Volot fonctionne davantage à la logique, qu’il applique à la stratégie, qu’aux intuitions. Mais quand il combine les deux…

En 1983, il fabrique pour d’autres des pièces de frottement pour le médical. En raisonnant comme un ingénieur mécanicien, il songe à une innovation qui vient considérablement réduire l’usure des prothèses de genoux : il travaille avec un chirurgien. Leur collaboration s’avère fructueuse et donne naissance à un implant de genoux promis à quelque succès.

«  Je détestais le statut de sous-traitant, qui est un statut d’esclave  » explique Jean-Claude Volot que titillait alors l’idée de fabriquer du médical pour son compte, et de livrer à l’acheteur final un produit fini. Il crée alors une usine à Montpellier : Dedienne Santé. Ce pied résolument posé dans l’univers du médical est le deuxième grand virage de la stratégie industrielle de Jean-Claude Volot.

Publié par Dominique PIOT le mardi 10 septembre 2020 dans le JHM (Journal de la Haute-Marne) http://economie.jhm-blogs.fr

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Yanmar (Saint-Dizier), Viant (Chaumont), Mikroland (Nogent), la reprise de la friche Farm Frites (Val de Meuse), Jean-Claude Volot (Auberive), l’Eco-Hebdo de Patrice Chabanet...Publié dans les pages économiques "le journal de la Haute-Marne" n° 9158 du mardi 10 septembre 2019 en page 4 et 5.

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Jean-Claude Volot : dans la mêlée

II. Jean-Claude Volot : dans la mêlée

Poursuivons aujourd’hui notre série consacrée au parcours industriel d’un enfant de Haute-Marne : Jean-Claude Volot.

Dans le premier épisode, nous avons laissé Jean-Claude Volot alors qu’il vient de créer Dedienne Santé, après s’être lancé avec Dedienne Polymères. De toute évidence, ses choix stratégiques relèvent de la clairvoyance industrielle, clairvoyance qui commence aussi à s’appliquer en art contemporain. Mais c’est une autre histoire.

Large d’épaules, le jeune Haut-Marnais expatrié à Paris est aussi employé comme garde du corps, lors de galas de boxe, pour les stars du grand écran qui venaient s’encanailler au pied des rings : Alain Delon, Gérard Depardieu, Pierre Richard etc.

Le stratège ne s’est jamais départi de son souci, de son obsession de transmettre ; en lui, l’enseignant contrarié a le sommeil agité. En 2004, Jean-Claude Volot transmet Dedienne Polymère selon la formule anglo-saxonne du Management Buy-Out (MBO). Les financiers désignent ainsi un processus de rachat d’une entreprise par son propre personnel (dont l’équipe dirigeante), par un recours à l’endettement. Le management buy-out, parfois désigné par son acronyme, peut s’effectuer avec la totalité des salariés, ou une partie seulement. Il y a dix ans, il renouvelle l’acte de transmission avec Dedienne Santé. Il n’en conserve qu’une petite participation. On notera qu’il confie les clés de la maison à un certain Patrick Rondot, comme lui Haut-Marnais d’origine, qui a fait ses classes chez Landanger (Chaumont).

Cette époque de croissance économique se trouve être aussi celle du rugby. La discipline et ses valeurs marqueront toute sa vie. Aujourd’hui encore, il vibre rugby. Il l’explique comme une partie d’échecs. Il s’apprête à vivre intensément la Coupe du monde qui débutera le 20 septembre. Jean-Claude Volot y a joué 27 ans. Il s’y est noué de solides amitiés. En management, on appelle cela du réseau.

En 1989, un ancien rugbyman reconverti à la CCI de Toulouse l’appelle : Airbus va avoir besoin de polymères. Jean-Claude Volot s’interroge. Créer ex-nihilo ? Reprendre une entreprise. En visitant SAFOM, une boîte de sous-traitance mécanique, il repère un outillage étrange. Il se renseigne : c’est pour Airbus. C’est le déclic : créer des outillages pour l’aéronautique, certes. Mais les vendre non pas aux constructeurs, dans une relation de soumission, mais directement aux grandes compagnies aériennes. Dans la foulée, SAFOM devient Dedienne Aérospace.

SAFOM devient Dedienne Aérospace : L’aventure décolle.

Jean-Claude Volot envoie son fils Karel Volot prospecter en Amérique du Nord. Le garçon s’installe dans un minuscule bureau ; aujourd’hui, Dedienne Aérospace, c’est trois usines à Miami, Cincinnati (USA) et Queretaro (Mexique) ainsi qu’un bureau à São Paulo.

Mais c’est aussi des usines à Dubaï, Singapour, Zhuhaï (Chine), Derby (Angleterre) ainsi qu’un bureau commercial à Moscou !

Publié par Dominique PIOT le mardi 17 septembre 2020 dans le JHM (Journal de la Haute-Marne) http://economie.jhm-blogs.fr

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"II Jean-Claude Volot : dans la mêlée" - Publié par Dominique PIOT le mardi 17 septembre 2020 dans le JHM (Journal de la Haute-Marne) http://economie.jhm-blogs.fr

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Jean-Claude Volot : je veux être le premier

III. Jean-Claude Volot : je veux être le premier

Le troisième et dernier volet de notre série consacrée au parcours industriel de Jean-Claude Volot nous ramène cette semaine en Haute-Marne, au pied d’une bibliothèque, à Auberive.

La semaine dernière, nous avons laissé Jean-Claude Volot à la tête d’un empire invisible : l’outillage utilisé pour la maintenance des avions. L’heure d’immobilisation coûte cher pour un Airbus ou un Boeing. Fournir les bons outils au bon endroit dans les meilleurs délais, telle fut la recette de Dedienne. Le groupe compte 174 000 références d’outillage. N’importe quel mécanicien aéronautique qualifié peut consulter le catalogue sur Internet et commander. Des bureaux d’études situés à Toulouse, Miami, Singapour et Zhuhaï veillent 24/24. Dedienne Aérospace est la seule société de ce type à être en liaison avec les plus grands motoristes du monde entier. Ce secteur très particulier ne représente “que” 2 % du marché aéronautique, mais lorsqu’on est un des trois leaders mondiaux de ces 2 %…

« Je veux être le premier. On le sera » commente aujourd’hui Jean-Claude Volot au pied de sa bibliothèque de livres d’art.

C’est avec ce monde-là, fait d’excellence, d’exigence, d’audace, de compétition exacerbée, que le 63e abbé d’Auberive prend quelques distances. «  J’ai vu des copains faire le match de trop. J’ai vu les conséquences parfois terribles de ce match de trop  ». Jean-Claude Volot demeure président du Conseil de surveillance. Il validera la stratégie générale (la stratégie reste son dada ; il l’a enseignée à la Sorbonne). 22 personnes constituent la team de direction de Dedienne Aérospace. Cette équipe repose sur deux piliers indéfectibles : son fils Karel Volot pour l’Amérique, son fils spirituel Cédric Barbe pour l’Asie. Du solide.

Jean-Claude Volot reste actif, pas seulement lorsqu’il s’emploie à ranger sa nouvelle bibliothèque, à l’usage des chercheurs (la transmission, toujours…). Il est aussi senior advisor de trois fonds d’investissement orientés “industrie”. Il disposera – peut-être – de plus de temps à consacrer aux collections de l’Abbaye, collections reconnues dans toute l’Europe.

Il veut aussi s’occuper des porteurs de projets du Parc national. Là, c’est aux Haut-Marnais, aux Côte-d’Oriens de tester sa puissance de travail. L’épuiseront-ils ? ça n’est pas certain…

Sait-on que l’ingénieur, l’industriel le plus prolifique de notre territoire, qui fut jadis apprenti aux Forges de Bologne, compte parmi les hommes les plus cultivés qui soient : collectionneur avisé, il a improvisé un soir de cet été une conférence sur l’histoire des Cisterciens. C’est aussi un boulimique de lecture. Pas des ouvrages techniques, abscons, mais du bon roman contemporain ; « pourvu que ce soit bien écrit  ». Comme il a écrit la première partie de sa vie : plutôt pas mal. Souvent très bien. Avec inspiration même. Les meilleures feuilles sont mêmes géniales. Sa vie ? On dirait un roman.

Publié par Dominique PIOT le mardi 24 septembre 2020 dans le JHM (Journal de la Haute-Marne) http://economie.jhm-blogs.fr


Pour en savoir plus :

 Jean-Claude Volot : itinéraire d’un surdoué le 8 mars 2016
 Comment Jean-Claude Volot a transformé l’abbaye d’Auberive du XVIIIème en centre d’art contemporain le 24 avril 2017
 Parc national : 241 000 hectares de forêt entre la Champagne et la Bourgogne
 Aide à la création d’entreprise : L’APCE / AFE devient bpifrance Création le 1er janvier 2019
 « Auberive , lieu incontournable du parc » 12 avril 2019
 La séance d’installation du conseil d’administration du Parc national de forêts s’est tenue le mercredi 23 septembre 2020 à Arc-en-Barrois.
 Jean-Claude Volot : un hussard haut-marnais chez Dedienne le 24 septembre 2020
 Agence d’attractivité de la Haute-Marne : un projet « innovant » et « unique » le 12 avril 2022
 Les Prix de l’innovation ont été remis au salon des Savoir-faire industriel le 17 juin 2022