Le mystère de la crypte des Preslots une halle à grains du XIIème siècle ?

, par Philippe Savouret

Le passage couvert situé entre la médiathèque et la place Charles-de-Gaulle, à Nogent en Haute-Marne, protége une crypte en son sol. Pour ceux qui l’ont déjà vu, cet endroit reste une enigme comme beaucoup de bâtiments anciens. Philippe Savouret a retrouvé quelques rares traces historiques de cet endroit mystèrieux.


Cette appellation de crypte est erronée car aucun édifice religieux n’existait à cet endroit. Ce n’était même pas un élément du château car celui-ci s’arrêtait au niveau de l’hôtel de ville actuel côté nord.

Si le château était protégé naturellement côté ouest et sud, il n’en était pas de même au nord et à l’est sur le plateau d’où la création de barbacanes, de défenses avancées.

Et cette "crypte" supposée du XIIème siècle se trouve proche d’un élément de défense car on observe à proximité, le rempart ouest et une tour bien visible au-dessus des "escaliers de la place". On suppose plutôt une halle à grains. Des recherches et observations de deux citoyens nogentais au XIXème siècle Claude Arthur Daguin et Abel Girard permettent de retracer un pan de son histoire.

Abel Girard, aussi bon historien que dessinateur, a laissé un plan de cette "crypte" en 1898 qui permet de comprendre l’ampleur de cet édifice.

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Les voûtes sont supportées par des nervures qui s’entrecroisent à leur sommet et reposent sur les chapiteaux des piliers dont ceux du milieu sont libres et isolés. (Photo : Philippe Savouret)

Un monument sous-terrain

L’escalier permettant l’accès compte 19 marches, décrit Abel Girard. Cette cave de la maison Poinsot a été comblée d’environ 2m et cacherait une dizaine de marches, soit en réalité une trentaine de marches.

Cette "crypte" avait une forme quadrangulaire régulière avec quatre travées à chaque salle ou nef. Trois travées sont observables, la quatrième travé existait mais un mur (GH) la fermait et se prolongeait dans la propriété voisine, sous les jardins des soeurs de la Providence. Deux soupiraux donnant de l’air ont été créés dans ce mur de clôture. Cette configuration est restée telle quelle.
Pour se faire une idée, la surface de la "crypte" jusqu’au mur correspond aujourd’hui à la partie couverte du passage entre la médiathèque et la place Charles de Gaulle.

La partie estimée (4e et 5e travées) correspond à la partie non abritée qui va jusqu’aux escaliers des places de stationnement derrière la médiathèque. Ce qui donne l’envergure de cette "crypte" !

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Les piliers sont couronné d’un chapiteau à volutes retombants, de style roman. (Photo : Philippe Savouret)

Descendons : deux salles ou nefs apparaissent d’une largeur de 3m. Les voûtes sont supportées par des nervures qui s’entrecroisent à leur sommet et reposent sur les chapiteaux des piliers dont ceux du milieu sont libres et isolés (A, B, C). Les piliers de chaque côté sont encastrés dans les murs (D). Les piliers du milieu ont 1m de diamètre. Celui près de l’escalier (A) n’a que 50 cm de diamètre. Couronné d’un chapiteau à volutes retombants, de style roman surmonté d’un entablement rectangulaire et lourd. Les socles des piliers étaient enfouis dans les gravas.

Une résurrection colossale

En 1988-1989, le propriétaire de cette "crypte" était l’hôtel du commerce proche. Celui-ci a proposé aux élèves du collège de Nogent de découvrir ce lieu. Une leçon d’histoire extraordinaire vécue en direct. Daniel Badoinot, professeur de maths, mais aussi féru de patrimoine, a proposé un Projet d’action éducative (PAE). Il s’est alors transformé en chef de chantier pour se lancer dans la mise en valeur du site.

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En 1988 un chantier historique pour les collégiens. A gauche Alain Vrillacq, principal adjoint, Daniel Badoinot,chef de chantier, et une partie des ouvriers collégiens. (Photo illustrant un article de presse du 07 juin 1989.)

Trois autres professeurs, Roger Petitpierre, Bernard Vanini et Michel Chaffaut ont décidé d’y intéresser leurs élèves. Quelques 5 000 francs ont été alloués au PAE, ce qui a permis d’acheter des pelles, des seaux, des casques. Une centaine d’élèves se sont relayés pour exhumer les gravats soulignés par Abel Girard fin XIXème siècle.

A raison de deux après-midi par semaine, six classes du collège se sont attelées à la tâche. Les collégiens ont remonté 40 m3 de déblais à la seule force de leurs bras pour mettre à nu le sol de la "crypte" évaluée à 70 m2. Rien n’ayant été fait depuis des siècles.

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« Des ouvriers bénévoles heureux ! Apprendre l’histoire locale et l’architecture sur le terrain, c’est le pied ! » (Photo illustrant un article de presse du 07 juin 1989.)

Selon le voeu du propriétaire, cette cave devait servir de lieu d’expositions et de concerts intimistes. Un haut lieu ou plutôt bas lieu de culture au centre-ville. Hélas, une fois terminé, ce chantier de restauration a été ouvert pour les journées du patrimoine et de la foire de la coutellerie en septembre 1989. Les collégiens étaient fiers de se muer en guide pour l’occasion. Et ce fut tout. Un très bon souvenir pour ces jeunes qui en reparlent encore.

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Dessin de la "crypte" par Roger Petitpierre, ancien professeur d’art plastique du collège de Nogent en Haute-Marne.

Roger Petitpierre l’avait dessinée in situ, le travail achevé a donné naissance à une carte postale que beaucoup possèdent. La Ville a eu l’opportunité de racheter les lieux ne répondant pas aux nouvelles normes d’accessibilité du XXème siècle pour être ouverts au public.

Dans le cadre de la rénovation du centre-ville de Nogent en Haute-Marne, entreprise de 2016 à 2018, la Ville en a profité pour protéger cette "crypte" d’abord en coulant une dalle avec un revêtement spécifique évitant les infiltrations et consolidant la structure.

Puis, l’entreprise Maillefert a complètement ravalé l’intérieur avec des projections à la chaux et le jointoiement des pierres. Elle est plus belle qu’au XIIème siècle (on le suppose). Cette "crypte des Preslots" n’en reste pas moins une énigme, les historiens penchant pour une halle à dîmes.

Publié par Philippe Savouret le dimanche 04 octobre 2020 dans le Journal de la Haute-Marne.

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Publié par Philippe Savouret le dimanche 04 octobre 2020 dans le Journal de la Haute-Marne.

Reproduction du texte avec l’autorisation de l’auteur Philippe Savouret.

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Dans le cadre de la rénovation du centre-ville, entreprise de 2016 à 2018, la Ville de Nogent, en Haute-Marne, en a profité pour protéger cette "crypte". (Photo : NOHMAD)

En partant du dessin de Roger Petitpierre, ancien professeur d’art plastique du collège de Nogent en Haute-Marne, le panneau de 6 x 4 m a été entièrement fabriqué en février 2022 dans les ateliers de l’entreprise Com & Stick.

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la crypte des Preslots
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La crypte des Preslots
Un passage couvert situé entre la médiathèque et la place Charles-de-Gaulle, à Nogent en Haute-Marne, protège une crypte en son sol. Pour ceux qui l’ont déjà vu, cet endroit reste une énigme comme beaucoup de bâtiments anciens. Philippe Savouret a retrouvé quelques rares traces historiques de cet endroit mystérieux.
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On pourra visiter la crypte des Preslots lors des Journées du Patrimoine les 17 et 18 septembre 2022. En attendant, on apprend beaucoup sur elle.
https://odguide.io/spip.php?page=sequence&code=51122&id_sequence=280
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La crypte des Preslots, un des lieux qui était ouvert exceptionnellement le dimanche 18 de 14 h à 18 h lors des 39e journées européennes du patrimoine qui ont eu lieu le samedi 17 et dimanche 18 septembre 2022.

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Au premier plan à gauche : Michel Chaffaut et Roger Petitpierre derrière deux des professeurs qui ont fait partie du chantier de remise en état de la crypte des Preslots parmi le public le samedi 17 septembre 2022 à Nogent (52800)

Pour en savoir plus :

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 L’Austrasie, le royaume mérovingien oublié qui refait surface à Saint-Dizier le 09 septembre 2016
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